Cette aspiration s’exprime dès la naissance de l’Inter Archives, ce plus grand centre téléphonique international de France, "cette ruche où se sont activées des milliers d’opératrices", selon l’expression d’Hélène Laffait qui y passa la majeure partie de sa vie professionnelle et vient d’écrire cet ouvrage.
Dignité, c’est en effet ce qu’un système inhumain, infantilisant, a dénié à ces femmes et jeunes filles, fraîchement venues de leur province et soumises à une surveillance incessante, tatillonne, considérées comme des numéros et non comme des êtres humains.
C’est de ce lent et persévérant combat pour la dignité, pour l’amélioration des conditions de travail, pour l’égalité femmes-hommes, mais aussi pour une meilleure qualité du service qui leur tenait à cœur, que témoigne cet ouvrage empreint d’émotion et rédigé par une militante qui, dans le cadre de ses responsabilités syndicales, a suivi de près la vie, le déclin puis la disparition de ce grand service.
Au fil des pages, on découvre, replacées dans le contexte social et politique des époques successives, les luttes de ces téléphonistes, d‘abord dans un service manuel puis face à l’automatisation et ses conséquences.
Leur ténacité et leur solidarité leur ont permis de conquérir des avancées dont elles surent très tôt qu’il fallait les défendre si elles voulaient les conserver.
Dans ces combats, la CGT a été l’outil précieux pour unir et rassembler sur des revendications élaborées en commun et défendues par le plus grand nombre.
Ce témoignage vient enrichir les propos recueillis lors du Colloque, tenu à l’initiative de notre Institut, les 22 et 23 octobre 2008, à Marseille, sur le thème "Les téléphonistes du XXème siècle et leurs luttes syndicales", colloque qui a donné lieu à un livre intitulé "Des Demoiselles du téléphone aux opérateurs des centre d’appel" publié en 2009.
Les téléphonistes d’hier sont de moins en moins nombreuses mais, grâce à Hélène Laffait et quelques unes de ces camarades encore actives, leurs combats ne disparaîtront dans la mémoire des militantes et militants d’aujourd’hui.
Puissent en particulier celles et ceux qui travaillent dans les centres d’appel y trouver des échos de leurs aspirations et de leurs revendications et les inciter à mener courageusement cette lutte toujours d’actualité pour la dignité et contre toutes les formes d’exploitation.
Téléphonistes à l’international: toute une histoire dans un immeuble chargé d’histoire
Construit en 1634, au 61 rue des Archives, à Paris, cet hôtel historique appartenait à l’origine à François Lefèvre de Mormans, président des trésoriers de France, qui le revendit à Charles de Marchault, dont la famille en restera propriétaire jusqu’en 1928.
En 1934, il devient propriété de l’administration des PTT. C’est officiellement cette année-là que le centre de Paris Inter Archives, dans sa dimension nationale et internationale, fait son entrée dans l’Histoire.
Mais on trouve des traces de son existence bien avant cette date.
En effet, ces grands immeubles ont d’abord abrité le central téléphonique interurbain, le central Archives, avec le réseau téléphonique à grande distance. Les circuits internationaux, au nombre de 52, jusque là répartis dans différents centraux, sont reliés en 1926 à l'Inter Archives, ce qui semble attester que ce centre existait bien avant cette année-là.
On trouve l’existence du centre Inter Archives, mentionnée à l’occasion d’une grève, le 15 mai 1930, dans la publication syndicale « le Journal des Dames n° 72 ».
De 1940 et 1944, une partie des locaux abritera la "Kommandantur" de l’occupant allemand. Les sous-sols, qui s’étendent de la rue des Archives à la rue du Temple, serviront d’abris à la population lors des raids aériens.
En 1946, une partie de la salle située au 4e étage est encore occupée par les troupes américaines.
En 1969, de nouvelles salles sont ouvertes.
En 1989, l’Inter Archives devient Centre International Manuel par Opérateurs.
Un ouvrage écrit par Hélène LAFFAIT
Hélène est née le 28 décembre 1934 à Annecy.
En 1951, elle est reçue au concours d’agent d’exploitation des PTT et débute sa carrière comme téléphoniste à Lille-Interurbain en 1952, où elle se syndique à la Fédération CGT des PTT.
Mutée à Lyon, elle est élue à la Commission Exécutive, puis au Bureau du syndicat départemental, avec la responsabilité de l’activité en direction des jeunes.
Mutée à Paris en 1965, elle est élue à la Commission Exécutive du syndicat des Télécommunications de Paris, créé dans le cadre de la décentralisation de la région parisienne, puis au Bureau Départemental du syndicat avec la responsabilité des grands centres féminins.
Élue à la Commission Exécutive Fédérale au 20e congrès, en 1967, puis au Bureau Fédéral au 21e congrès, en 1970, elle siégera dans ces deux instances jusqu’au 24e congrès, en 1979.
Elle prend sa retraite le 1er janvier 1995 et s’investit dans l’activité de l’IHS-CGT-Fapt dont elle est membre du bureau de 2011 à 2016. Elle participe activement à la tenue du Colloque sur les téléphonistes en octobre 2008, notamment par sa contribution écrite reproduite dans l’ouvrage "Des demoiselles du téléphone aux opérateurs des centres d’appel" (pages 285 à 289).
N'hésitez pas à commander cet ouvrage de 96p, vendu au prix de 5€ au siège de l'IHS Cgt Fapt.